Le jardinier du diable


Cécile Dumas - NOBS : Selon des légendes locales, c’est un esprit diabolique qui cultive au sein de la forêt amazonienne ces endroits où ne pousse qu’une seule espèce d’arbre. Selon trois chercheurs américains, la véritable responsable de ces parcelles surnommées ‘’jardins du diable’’ est une fourmi qui vit en symbiose avec l’arbre et qui empêche les autres de s’installer en les empoisonnant.


L'Amazonie
La fourmi Myrmelachista schumanni vit dans les troncs creux de l’arbre Duroia hirsuta. L’insecte ne parasite pas la plante : leur système est mutualiste, chacun y trouve son compte. Au sein d’un forêt riche par sa diversité, les niches de Duroia hirsuta font exception. Deux phénomènes peuvent expliquer leur formation : soit la plante décourage d’autres espèces végétales de s’installer (allélopathie), soit la fourmi se charge du travail. Megan Frederickson (Stanford University) et ses collègues ont testé les deux hypothèses en plantant de jeunes cèdres d’une espèce locale dans ces ‘’jardins du diable’’, en protégeant certains pieds des fourmis.

Les ouvrières Myrmelachista ont aussitôt attaqué les nouveaux venus, injectant dans leur feuilles un poison bien connu, l’acide formique. La nécrose commençait au bout de 24 heures. En revanche les jeunes cèdres protégés des fourmis ont survécu. La fourmi est le gardien de ces jardins où ses colonies prospèrent en paix pendant au moins 800 ans, précisent les chercheurs dans la revue Nature publiée aujourd’hui. Quant à l’arbre Duroia hirsuta, il peut pousser sans crainte d’être concurrencé par d’autres espèces végétales.